Asmeuk mon Loss, par Gwen

"- Pourriez-vous me décliner votre CV ?
- J'bossais au black, j'en ai ma claque de cette arnak
Je veux palper du blé, tu crois quoi, j'suis commak
Ce boulot, ce métier, sûr, je veux le gagner.

J'étais prof, tiens toi bien, au Creusot-en-Velin,
Pour des minots j'enseignais la langue peura.
Depuis qu'au Panthéon, est enterré Booba,
Le "staïl" phrasé rap à ses académiciens

- Je vois que vous êtes en pleine reconversion
Pensez vous qu'une équip', vous pourrez diriger
Manager, motiver, les faire travailler
Ils devront transpirer, vous avez des questions ?

- En l'an deux mille deux cent quatre-vingts dix-neuf
Il faut savoir ne pas être trop difficile
on perd son boulot dans un battement de cil
pour réussir je veux bien trimer comme un bœuf

les employés voudront travailler sans répit
ils penseront ainsi gagner ma clémence,
de leur implication dépendra leur pitance
sinon le trottoir consolera leur dépit

- Je vois que vous maitrisez aussi le français
Si elle vous procure un côté distingué
La "wesh langue" aujourd'hui, n'est plus guère usité
- Pour ce poste, c'est bien ce que j'imaginais

ce parler français, j'arriverai à garder.
Si par mégarde je venais à m'oublier,
je vous serai gré de vouloir me l'indiquer
- Bien sûr, volontiers votre humble majesté

Pensez-vous que je n'ai que cela à faire ?
Pour vous corriger, Mc Donald va me payer ?
- Bah, j'disais ça comm' ça, faut pas dramatiser
Si t'es pas d'ac, pas OK, juste "ta mère"

Et demain, si tu ne veux pas être mon boss
Que je te croise, un conseil, change de trottoir
Pour ta santé, ta survie, évite le noir
Avec moi, je te préviens c'est asmeuk mon Loss

Va te fair' bouyave et tous tes ancêtres avec
En fait j'préfère mendier que me prostituer
C'est pas le capitalisme qui va me tuer
Un mec petit comm' toi ne vaut pas un Kopec

- Je crois monsieur que c'est la fin de l'entretien.
Je vois bien que vous ne voulez pas travailler,
C'est pas mon problèm', si vous préférez bailler
- T'as raison, je me casse espèce de sal'chien

Illustration : Booba Photomanix, par ridoine92, sur DeviantArt

Comments

[d'autres]

Tiens ?... Voilà que j'écris des commentaires sans le savoir ... Sénilité précoce ? Double démoniaque ? Somnambulisme ? Hm ...

J'aime te voir suer toutes les eaux de ton corps, Gwen, et pour le coup je me dis que tu as du remplir une baignoire ou deux.

Je ne suis pas convaincu, introduirai-je pour te faire stresser. Pas convaincu par ton analyse de vieux français et son application dans ton texte.
D'accord, l'idée de faire de la wesh langue un vieux français est une appropriation amusante du sujet, pour ne pas dire rusée. Là où mon bât blesse, âne que je suis dans mes obsessions, c'est dans la notion de vieux français. Le langage peura fut enseigné en universités, mais n'est plus usité, lui conférant un atour précieux. Bien, jusque là ça colle avec le vieux français. Mais quel nouveau français nous offres-tu par opposition ? Du bon vieux français à la moderne, celui qu'on pratiquait avant le wesh, celui qui fut vieux après avoir évolué; Un français moderne qui en 2299 tourne à l'identique de celui de 2009. Alors me faire croire que la langue aurait assez évolué pour que la peura s'impose jusqu'à être enseignée, sans que ses impulsions n'affectent la construction de la principale, ça ne fonctionne finalement pas.
Ou le langage peura s'impose, universel dans la francophonie, à tel point que le français classique en soit vampirisé et que le dico des sémillants académiciens lui fasse la part belle, auquel cas, si vieux français il peut y avoir, le nouveau en découle forcément, dynamique linguistique oblige.
Ou pas. Et le truc est éventé.

Sorti de cette argutie, je salue l'effort, parce que tout de même, autant que souris de voir ton militantisme quant au langage pour tous porté ainsi au pinacle.
Je ris tout autant en collant ta photo du petit ourson sur la tête de ton demandeur d'emploi, sûr que le pare-soleil McDo lui va à ravir. Tout autant que l'opposition avec le gentil manager en chemise bleue faisant fétu face à lui.
J'aime également l'application, dans les quatrième et cinquième paragraphe, à user d'un langage châtié, ma foi fort digeste, ça ne rend que plus académique l'ex enseignant.

Et en définitive, parce que finalement exigence et bon public ne font pas forcément mauvais ménage, j'ai apprécié la lecture autant que le discret message antitrust des dernières lignes.

Ha par contre, j'ai eu beau le retourner dans tous les sens, jouer des anagrammes, ajouter des lettres, en enlever, impossible de trouver une signification à l'expression "asmeuk mon Loss" ...

[Lila]

Bravo pour le cours de vieille langue du Futur !

[d autres]

Jolie l'esquive pour le vieux français ...