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Zone d'expérimentation
11 juin 2009

Te souviens-tu 2/2, par d'autres

Wrath_by_Taser_Rander

<p>Son cœur s’est arrêté de battre un beau matin, ou peut-être une</p>

Je me souviens d’une étincelle, d’un feu aux poudres dans ma sainte-barbe et d’une déflagration sourde quand volent les plaques d’airain protégeant des mutineries. Par la brèche béante dans ma coque s’engouffr’ des litres d’ire salée, et sombre, la proue en avant, la frégate de ma volonté. Combien d’années entreposées dans ces soutes aux nombreux verrous, combien de frustrations, de peines, d’humiliations, de soumissions, combien de révoltes muselées mettent à bas la superstructure de ma morale, de ma conscience. Trop pour pouvoir y résister, se raisonner et se calmer, ne me reste plus qu’à danser entre ces flammes aux langues glaciales. Et ça ouvre de grands yeux pâles, étonnés du revirement, alors que ma main à sa gorge, le pyromane se fait pompier, et ça comprend qu’il y a erreur, on a viré au mauvais cap, erreur de lecture de la carte pour un naufrage préprogrammé. Mon sourire en lame de rasoir ne dois pas être rassurant, ça voudrait crier comme un terme, dire un mot-clef non convenu, et la gorge ne rend finalement que le couinement d’un ballon dont on tire les souplesses du col.
Je me souviens des déferlantes propulsant mon bras en avant, que l’écume naisse entre les rocs d’une dentition ravagée,  un moindre mal si t’aimes la soupe ou crois à la petite souris, et je suis ressac et renvoie à sa face la contrariété d’un appétit non assouvi. S’est enclenché sans crier gare le pilotage automatique, une navigation de nuit, sans visibilité aucune, sur le tanker de la fureur, et son inertie imposante assure une vitesse de croisière dans un va-et-vient de machines. Ça crie, ça hurle et ça gémit, reprend son souffle entre deux vagues, un fétu valsant follement, ballotté d’un rivage à l’autre par la tempête de mon courroux. Ca implore aussi, sûrement, mais la vase pourpre articule mal, les crachotements me distraient, rendu sourd par les pulsations de la rage au bout de mon mât. Seraient-ce les feux de Saint-Elme crépitant sur mon artimon qui font cette douce sensation, cette paix inscrite en tourmente, à se fondre dans un bruit blanc, immaculé et funéraire.
Je me souviens comme, brusquement, pétole a remplacé Eole, laissant ce sentiment de vide face à l’immensité du large. A mes pieds suinte la charpie malaxée à bouts de phalanges, et ça tremble suffisamment pour assurer d’un peu de souffle. Un mal de mer noue mes boyaux à en régurgiter le vide ; je déglutis et je salive pour contrôler les premiers spasmes, une main cherchant bastingage auquel accrocher mon tangage. Les heures sont hautes sur l’horizon, on n’va pas tarder à m’attendre, mais je dois encore me trouver une apparence présentable et stabiliser l’estomac, qu’il puisse reprendre son office. Je sors une poignée de billets valant chacun pour une excuse, couvre le corps d’un drap rubis, que ça ne m’accuse de prendr’ froid, et je quitte enfin au jugé les appartements du forfait. L’oubli sera précipité dans la recherche d’un prétexte à servir aux gosses et madame pour ce retard dominical. Quant à savoir si je pourrai ingurgiter un seul morceau du gigot et de ses fayots, je préfère n’y songer encore, l’évocation me noue les tripes.

Illustration : Wrath, par Taser-Rander, sur DeviantArt

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Commentaires
D
Deux perceptions opposées de la fin, aussi justes l'une que l'autre, je trouve.<br /> Il y a effectivement deux façons de conclure un tel texte.<br /> Soit on cherche à raccrocher à la normalité, ainsi que fait ici, choisissant de confronter l'homme à la bête qu'il a pu être, avec la gêne qui en découle, cet amer sentiment de dégoût pour ce à quoi on vient de succomber. Le propos de dvb. De fait, l'auteur convient d'une fin morale, taper les gens qu'on baise c'est mal, le personnage a bien raison de ne pas se sentir bien, moi d'ailleurs à sa place ... Et il en reste un vague sentiment d'excuse, pour une telle ignominie, l'innocence est perdue, mais son souvenir perdure. Le lecteur en est subtilement soulagé, la morale est sauve, donc, et vient de fait une oxygénation de bon aloi.<br /> Soit on va jusqu'au bout de la démarche, sans honte ni regret, s'arrêtant comme le suggéra Gwen à la pluie de billets d'excuse, brut, brutal, acceptant qu'il puisse s'agir d'une réalité, non d'un simple pétage de plombs. Découverte ou non, il a aimé, qu'importe de savoir si monsieur trompe sa femme, s'il refoule, s'il est abasourdi. Et l'auteur d'assumer jusqu'au bout, sans chercher à conforter la bonne morale. Que le lecteur soit englué dans l'horreur qu'il lit, son côté inéluctable, en traduit donc une plus grande force, plus ... bouleversante, donc plus sujet à réflexion.<br /> En substance, la seconde possibilité me parle plus, déjà ennuyé par la précédente note d'intention à rallonge sur comment que je ne suis pas un psychopathe. Ce sera pour la prochaine infamie ...<br /> Ha puis du coup le titre concourt également de ce côté accusateur réfuté dans la seconde analyse ...<br /> Note en passant : en parlant de côté brutal et d'assumer, le récemment vu Mysterious Skins, de Greg Arrakis (??) s'y prête, allant jusqu'à retrouver dans une scène le propos du texte.
D
stoi le défons !
G
zobi<br /> *se défend
G
dvb, ton point de vue ce défend
D
Alors quant à cette fin justement, je vais rebondir sur le fait que justement, c'ets tout à fait "logique".<br /> <br /> Après s'être adonné à cette bestialité avilissante et ô combien asservissante, la bête redevient homme. C'ets bien connu, tu en feras l'expérience toi-même à l'occasion si tu le souhaites : après avoir éjaculé de tout ton saoul, tu te mets à te rappeler qu'il faut ensuite nettoyer toutes tes saloperies.<br /> <br /> post-coïtum quand tu nous ... ah ben nan ! t'es plus là.
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